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Quand, dans une équipe, chacun travaille avec un quota d’heures différent, difficile de garder la cohésion d’équipe. Et pourtant les temps partiels sont amenés à se multiplier. Ils demandent une organisation particulière, qui, bien gérée, offre une source de flexibilité pour l’entreprise et de bien-être au travail pour les collaborateurs.
Démocratisation
Les temps partiels ne sont plus réservés à un secteur en particulier (restauration, pharmacie), ni à un genre (féminin) encore moins à un choix de vie unique (privilégier du temps pour ses enfants). Travailler à 50, 60 ou 80% est aujourd’hui une aspiration quasi générationnelle, motivée par une recherche d’équilibre entre vie privée et professionnelle, et d’épanouissement personnel.
On peut réduire son temps de travail parce qu’on cumule deux activités professionnelles différentes (c’est le cas des ‘slashers’), parce qu’on souhaite développer une pratique sportive ou artistique, ou encore se former, construire sa maison et prendre sa part dans la gestion de sa famille. La tendance est lourde et partie pour durer.
Dans un marché du travail en tension (100 000 postes non pourvus au printemps 2022), la conséquence pour l’employeur confrontée à cette demande est simple : « inutile de demander à son collaborateur de justifier pourquoi il souhaite travailler à 80% plutôt qu’à 100. Il s’agit plutôt de respecter son choix et ses envies, et de le gérer en adéquation avec le fonctionnement et la culture de l’entreprise », explique Marc Hubacher, responsable des ressources humaines au Centre Patronal.
Cohésion d’équipe menacée
Le principal souci des temps partiels multiples dans une équipe ? «La cohésion d’équipe est bien plus difficile : puisque les personnes sont moins présentes, il peut y avoir très rapidement une désolidarisation », observe Marie Naudy, directrice générale du groupe Sidin Hotels (5 établissements) et responsable pédagogique de la filière du brevet RH de Romandie Formation.
Les solutions ? D’abord, une entreprise confrontée à des temps partiels multiples doit ouvrir les yeux sur la situation et accepter de revoir toute son organisation. « Parfois on n’a pas de solutions, il faut pouvoir inventer, être créatif, parfois tester des solutions », explique Marc Hubacher. Avec pour objectif un fonctionnement d’entreprise pérenne et efficace.
Une des clés est de pouvoir s’appuyer sur « des managers extrêmement fédérateurs et compétents, particulièrement bien formés », pointe Marie Naudy.
Le rôle de la personne chargée de faire le lieu entre toutes ces individualités devient primordial. Elle doit être capable et de s’assurer du bien-être et de l’engagement individuel, tout comme du respect des tâches et missions fixées à l’équipe.
Des outils indispensables
Lorsque tout le monde travaille à distance et avec des horaires et rythmes différents, le piège est de fixer une structure d’organisation rigide (jours de présence fixés par contrat, cahier des charges défini, dossier réservé à une seule personne). Au contraire mieux vaut privilégier deux principes-clés : la communication, tout d’abord et la flexibilité.
Pour ce qui est de la communication dans des équipes qui se rencontrent peu, « donner des retours, avoir des outils de communication fiable et réfléchir à la manière dont on transmet une information prend une dimension beaucoup plus importante », explique Marie Naudy.
La pandémie a heureusement permis la démocratisation de toute une série d’outils : groupes de chats, visioconférences, messageries instantanées… A chaque équipe de choisir ce qui lui convient. Quelques principes sont importants : « on peut prévoir un accord interne dans l’équipe sur la manière de communiquer : tel canal pour les urgences, tel outil pour la communication générale et globale », explique l’experte. Dans tous les cas, maintenir un canal ouvert et accessible à tous en tout temps permet de créer du lien, y compris avec les personnes qui ont des tous petits pourcentages de travail (10 ou 20%).
Concernant la flexibilité, elle doit être de mise des deux côtés. L’employeur l’offre dans le temps de travail, à l’employé de savoir s’adapter aux besoins de l’activité. Par exemple en travaillant un jour de plus que prévu une semaine, quitte à prendre un repos plus tard. Ou, sur un temps partiel annualisé, de réaliser ses heures de travail au moment où l’activité est la plus forte.
Eviter le surmenage
L’autre risque, c’est, côté salarié, de vouloir réaliser les tâches correspondant à un emploi à 100%, dans un poste à 80%. Dans ce cas, « au manager de déculpabiliser ses collaborateurs. Il peut par exemple leur demander combien de temps ils estiment nécessaire à une tâche », explique Marie Naudy. Cela a pour effet de clarifier, conscientiser et d’objectiver les délais équitables pour une mission donnée.
Le danger de travailler à temps partiel est de ne pas réussir à poser clairement une période de congés. « Parfois certains vont préférer travailler en début de semaine, et à la fin de la suivante, et ainsi de suite, et profiter du temps entre les deux pour partir. Mais ce n’est pas idéal », observe Marie Naudy.
En effet, pour le salarié, la qualité de la déconnexion n’est pas la même que lors de congés officiellement posés ! Pour l’entreprise, le risque est de se retrouver avec une série de vacances non prises à la fin de l’année. L’employeur peut, en théorie, imposer des dates de congés. Mais pour une bonne ambiance d’équipe mieux vaut discuter de ce sujet et s’assurer régulièrement que des temps de vacances soient pris.
Et les postes à responsabilités ?
Le tabou est aujourd’hui levé : oui il est possible d’être responsable sans travailler à 100%. Mais à certaines conditions. Un ou une cadre doit faire preuve d’une relative certaine flexibilité et d’un certain engagement.
« Cela suppose ainsi de pouvoir être totalement disponible en cas de coup dur ou de crise à gérer, quitte à rattraper des jours de repos par la suite. Ou de regarder ses mails quotidiennement, juste pour s’assurer que tout est sous contrôle », remarque Marie Naudy.
Enfin, il semble difficile d’envisager de vraies responsabilités sous un taux de travail à 50 voire 60%. Et, dernier détail: la présence reste importante. Si le travail à distance est aujourd’hui facilité, le cumuler avec le temps partiel reste périlleux, lorsqu’on dirige une équipe.
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